La cure proportionnelle d’Amblie
dimanche 8 janvier 2006, par Nicolas Stephant
Pourquoi les moines de Fécamp possédaient un fief à Amblie.
Au Xème siècle, après une période troublée, la Basse-Normandie a fait l’objet d’une véritable politique de « reconquête monastique » rendue nécessaire dans l’esprit du duc Richard 1er par le peu d’implantations restantes dans cette partie du duché. Il va tenter d’y remédier en donnant des terres dans cette zone aux grandes abbayes pour les inciter à y fonder de nouveaux établissements. Parmi celles-ci Fécamp, qu’il vient de restaurer, va recevoir le 15 Juin 990 Argences et Mondeville avec leurs dépendances. Un peu plus tard, entre 1000 et 1026, les moines de Fécamp vont recueillir Amblie, Anisy, Ryes, trungy, Troarn et Aizon.
Les terres d’Amblie ne sont pas un cadeau du duc, mais un don de Muriel d’Amblie qui inclura Marchésieux et Morsalines [1]. A la suite de cette donation, Fécamp va devoir batailler ferme pour conserver Amblie car la donation sera contestée par Waléran fils du monétaire Renouf. Cette contestation finira par coûter cher à l’abbaye qui devra verser, en fin de compte, 88 livres pour acheter la renonciation du contestataire et la confirmation par le duc ; on ne sait d’ailleurs pas si la donation originelle à été conservée entièrement ou si Waléran en a récupéré une partie. Il est possible que les terres d’Amblie aient été rattachées à la baronnie d’Argences mais, si c’est le cas, nous ne savons pas à quelle époque ; Fécamp avait droit de haute justice sur ses domaines ce qui impliquait une structure administrative et l’entretien d’officiers qui avait peut-être été regroupés sur la baronnie d’Argences comme c’était le cas de la baronnie du Petit-Fécamp en Cotentin.. [2]
En 1233, le 1/4 de fief de chevalier d’Amblie qui dépend de Fécamp (tenu par Jean de Pierrepont) est donc issu de cette donation originelle. Ce fief ne recouvrait pas les subdivisions territoriales modernes mais était inscrit avec d’autres dans l’actuelle territoire d’Amblie. Le pouillé du diocèse de Bayeux de 1356 [3] nous apprend de plus que la cure d’Amblie (l’ensemble des possessions de Fécamp à Amblie) est divisée en deux portions entre Jean de Pierrepont et Geoffroy de Rupaley (Jean détenant la deuxième portion qui comprend le village de Pierrepont). Il y avait à Amblie un autre fief qui était, lui, tenu du roi et appartenait à Robert Murdrac en 1125 (qualifié de seigneur d’Amblie), comme le sera son fils Roger II en 1211.
Seul Gilles de Pierrepont, fils de Léon, réunira brièvement entre ses mains la totalité de la cure proportionnelle de ses ancêtres et le fief royal lorsqu’il achètera ce dernier à Guillaume de Languaulnay qui l’avait reçue du roi François 1er [4]. Gilles opérera un remembrement, en 1567, en donnant ce fief au sieur Godes en échange de terrains à Amblie. Les Pierrepont vont continuer à détenir la 2ème portion de la cure d’Amblie depuis le XIIIème siècle jusqu’à la révolution, ce qui représente une belle constance dynastique, mais nous ne savons pas comment elle leur fut attribuée.
L’abbaye de Fécamp était un vassal direct du pouvoir central en Normandie (duc, duc-roi d’Angleterre puis roi de France) et devait à ce titre un service de 10 chevaliers. Il fallait bien que des laïcs soient installés sur ses terres pour fournir ce service.
Fécamp ne fondera finalement aucune abbaye contrairement à l’intention du duc Richard 1er mais elle jouera quand même un rôle dans le rétablissement de plusieurs paroisses et l’organisation du culte en Basse-Normandie.
Nicolas STEPHANT
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